Retrouvailles

Ce matin, en ouvrant une des caisses de ce foutu déménagement, j'ai retrouvé avec bonheur un cadeau que je croyais perdu. Un ami m'avait offert L'abécédaire de Gilles Deleuze en DVD. En guise de générique, avant chaque lettre, on voyait Gilles entouré de dizaines d'étudiants venus suivre son cours comme s'ils allaient au ciné. Disons qu'on devinait Gilles, plutôt, perdu qu'il était dans un lourd nuages de diverses fumées. Ce générique serait sans doute interdit aujourd'hui.

On peut retrouver l'abécédaire en entier sur YouTube. Je conseille vivement de les visionner de A à Z. Mais, à petites doses car une telle intelligence, une telle lucidité sont choses qu'il convient de siroter très lentement. Même si je n'aime pas l'Humanité, même si j'ai des doutes profonds sur l'existence de l'Amour (et plus profonds encore que sur l'existence de Dieu), il m'arrive quand même d'avoir des esquisses de générosité. Surtout en cette période de fin d'année. C'est donc avec plaisir que je vous offre cet extrait de l'abécédaire deleuzien. C, comme culture... C'est stimulant.

Atteint d'une grave maladie pulmonaire, Gilles s'est défenestré. Je me dis que je ferais bien la même chose, mais comme j'habite au premier, je risquerais tout au plus de me retrouver avec des membres brisés à l'Hôtel Citadelle.

Avant le lien une photo de Gilles avec sa fille Emilie. Il fut aussi un papa sur la tard.

Maintenant, écoutez-le en silence...

https://www.youtube.com/watch?v=5Y0yuntvspI

Comments

[Michèle P]

"Les mouettes" de Nicolas de Staël, c'était une rencontre. De celles qui marquent une vie.



Ce sont ces rencontres qui nous font vivants et nous permettent de dire : "Je viens d'entendre le vent ; et ce moment vaut d'être vécu."

[Michèle P]

Je trouve très juste ce que Deleuze dit sur la "rencontre", ces rencontres qu'on fait avec telle phrase dans un roman, tel tableau, telle œuvre. C'est ce que j'appelle aussi une rencontre, à côté de quoi la rencontre avec une personne dans le quotidien est toujours décevante. L'ordinaire, la vie ne permettent pas la rencontre et ce n'est pas gênant, on a besoin de ne pas être toujours sur des pics.

[ parenthèse : c'est pourquoi une vie de couple n'est viable que s'il y a assez d'air dans la relation pour que toutes ces rencontres qui tissent une vie (intérieure) soient possibles voire parfois se partagent. Il suffit d'être adulte, autonome, un peu généreux...]



Ce que j'aime bien chez Deleuze (nous sommes avec cette vidéo dans une conversation, ce n'est pas l'écriture), c'est sa fulgurance.

J'aime comme il raconte qu'à l'occasion de son livre sur Leibniz, à propos de la notion de "pli", il a reçu des lettres dont une de "plieurs de papier" et ils lui ont dit :"Les plis c'est nous ; on est complètement d'accord avec ce que vous écrivez". Des surfeurs aussi lui ont dit : "Mais nous on est tout le temps dans les plis de la nature. On avance dans les plis mobiles des vagues. Vos plis, c'est nous".

Avec son livre sur Leibniz, Deleuze avait "rencontré" des surfeurs, des plieurs de papier...