Une semaine de vacances VI
Notez que, lorsque vous vous retrouvez à l'hôpital, simplement pour des examens, pas aux urgences, ni aux soins intensifs, ca relativise beaucoup de choses. Vous croisez des mourants, des vivants qui se croient encore en vie, tellement peu que c'est à peine si on ne les pas déjà mis dormir dans le cerceuil, histoire de gagner du temps dans l'usine...
Jeudi. Dans la salle d'attente, près de moi, un jeune homme frappé d'hémiplégie. Toutes les deux secondes, il fait des gestes incontrôlés. Toujours les mêmes. Une fois la main, une fois le pied. Terrible. On dirait Tchantchès exhibé par un mauvais marionnetiste. Terrible. Sa bouche n'émet plus de mots. Juste des grognements. Terrible. Même le médecin se dit qu'il ne sera pas possible de lui faire un fond de l'oeil. Comme si, dans l'état où il est, le jeune homme s'en foutait pas mal de ses yeux. Pourtant, visiblement, si j'ose dire, il ne répond pas encore aux critères de l'euthanasie. Je le regarde. Impossible de ne pas le voir. On dirait qu'il appelle à la mort et personne ne l'entend.
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Jeudi toujours. Histoire de détendre un peu l'atmosphère, je demande à la jeune stagiaire si elle ne veut pas venir règler mon lit parce que je m'y sens mal. Elle me regarde un peu étonnée. Oui, la tête est trop haut, les pieds trop bas. Vous pouvez attendre, monsieur, je dois encore m'occuper d'un autre patient. Oui. J'ai le temps. La voilà qui revient une demi-heure plus tard, juste au moment où je crie "infirmière" ! Elle éclate de rire. Ah ! voilà seulement mon franc qui tombe, dit-elle. Je me disais bien que quelque chose clochait...