Merry Christmas, mon cul
Je vais sans doute vous étonner, mais je n'ai jamais été un grand fan des réveillons. Si, si, je vous le jure. Ça doit venir de mon enfance. On ne les fêtait pas systématiquement. Je me souviens surtout de celui de l'hiver 60. Une année noire pour la Belgique. Les flics avaient même tué des ouvriers devant la gare des Guillemins. Le journal la Wallonie avait été censuré pour avoir titré "Soldats, ne tirez pas sur vos frères". Papa avait décidé d'inviter ses frères et soeur à passer le réveillon à la campagne. Ma mère, qui était une excellente cuisinière (il faut bien que j'admette qu'elle avait certaines qualités) avait préparé une oie farcie. Mais, la veille du réveillon, toute la Belgique était en grève, les pompes à essence vides, de sorte que personne n'avait pu rejoindre la campagne et que nous avions-dû nous farcir l'oie pendant une bonne semaine.
Plus tard, ayant eu le malheur de tomber amoureux de trois femmes (pas en même temps, hein), ju fus condamné aux réveillons dans la belle famille. Quel ennui ! J'y allais parfois, mais, le plus souvent, je trouvais une excuse pour rester chez moi. Et Joseph n'est pas là ? Non, ça se voit pas ? Enfin, heureusement, maintenant, ça fait dix-huit ans que cette corvée m'est épargnée. Même si j'ai déjà accepté l'invitation chez des amis. Mais ce n'était pas des réveillons de famille.
Mardi, ma fille me disait qu'elle passerait le réveillon chez ses grands-parents. Pff, papa, on va encore manger de la biche, de la bûche, c'est chiant. Ben, n'y va pas. Mais on est obligé d'y aller. C'est bien ça qui est chiant: être obligé de faire semblant que l'on est heureux.