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Liège, hélas
17 avril 2011

Invalide

Dans son commentaire que je viens de publier, Laura Fish semble s'indigner que on nouveau "statut" d'invalide m'interdise d'encore écrire et de publier. Pourtant, cela n'a rien d'offusquant et répond même à une logique certaine. Je ne connais pas les lois d'autres pays européens, mais, en Belgique, est considérée comme invalide toute personne étant en état d'incapacité de travail. Ce n'est pas moi qui ai choisi ce nouveau statut, c'est un médecin qui a considéré que je répondais aux critères nécessaires. On a souvent tendance de confondre "invalide" et "handicapé". Un aveugle, un cul-de-jatte, un paraplégique, par exemple, est un handicapé (un nandicapé comme on dit maintenant) mais peut être parfaitement capable de travailler. Même si cela lui posera d'énormes problèmes pour être engagé.

Un invalide, non.

Il est donc tout-à-fait normal qu'il ne puisse plus avoir le droit de faire quoi que ce soit. Ni du macramé, ni cultiver des pélargoniums pour décorer ses appuis de fenêtre. Même si son invalidité le handicape, il n'est pas un handicapé. Il appartient à une autre sous-caste.

Faisons un peu de fiction. Imaginons Beethoven (sourd), Hartung ou Robert Wyatt (tous deux en chaise roulante) vivant en Belgique en 2011. Etaient-ils invalides ou handicapés ? Dans le premier cas, ils n'auraient pu ni composer, ni peindre. Sous peine de se retrouver à l'assistance publique. 

Un autre problème se pose en Belgique : l'artiste (peu importe son domaine) n'a aucun statut reconnu. Cela fait cinquante ans qu'on se dit qu'il serait bon de leur en accorder un, mais on n'a toujours pas trouvé la solution. Il est fort probable d'ailleurs qu'on n'en trouvera jamais. C'est un sous-statut fort particulier. Les Liégeois se souviendront que, dans les années 80, un de leurs édiles avait suggéré d'interdire toute activité artistique après 65 ans... 

C'est un paradoxe fort étrange. Dans la vox populi, l'artiste ne travaille pas. Il "joue" au théâtre, il "joue" de la musique, il "joue" avec les couleurs ou les mots. Etc. La Loi d'ailleurs partage ce point de vue en n'accordant pas un statut à ces êtres humains. Mais, dès qu'il s'agit de rentes éventuelles, la Loi décrète que ces jeux sont un travail. 

L'on m'a rapporté plusieurs témoignages d'invalides qui, afin de garder le moral, se faisaient peintres du dimanche, musiciens du samedi ou écrivains d'après les vêpres. Et qui, pour conserver un semblant d'existence sociale, exposaient leurs oeuvres à deux sous (ceci dit sans me moquer d'eux) lors de certaines kermesses. Carte rouge directe...

Inhumain ? Non, pas du tout. Juste la Loi. Ils n'avaient qu'à la connaître.

De mon côté, je m'en fiche un peu beaucoup. À quarante centimes l'exemplaire vendu, je préfère encore ne plus écrire un mot et survivre de mes rentes. Même si, avec 1014 euros par mois, je suis obligé de ne prendre mes médicaments qu'un mois sur deux (les mois de 31 jours). Et puis, comme je n'ai, selon mon "éditeur" que 130 lecteurs, la perte de mes mots ne fera pas pleurer grand monde...

 

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